Manger main : guide pratique pour les chefs de cuisines en EHPAD
Le manger main consiste à proposer des repas sous forme de petites bouchées, qui peuvent être mangées directement avec les mains, en une ou deux fois. Les aliments servis peuvent prendre de nombreuses formes et textures en fonction des besoins spécifiques de chacun.
Qu’est-ce que le manger-main ?
Le concept de “manger-main” (en anglais : « finger food » ou FIFO) a été développé au début des années 2000 en Suisse par le Pr Charles Henri Rapin pour encourager le maintien d’une alimentation autonome dans les services de gériatrie.
C’est désormais un mode d’alimentation largement recommandé par les diététiciens et adopté par un nombre croissant d’établissements spécialisés dans l’accueil de personnes âgées et/ou souffrant de troubles cognitifs.
Alternative à l’alimentation classique, le manger-main présente en effet de nombreux avantages et se révèle une solution à la fois peu coûteuse et relativement facile à mettre en œuvre.
Les avantages du manger-main
Le manger-main est destiné principalement aux personnes souffrant de pathologies susceptibles d’entraîner des difficultés dans la prise des repas : démences et maladies neurodégénératives (Alzheimer, Parkinson, maladie de Huntington, scléroses, etc…), AVC, traumatismes crâniens, arthrite, déficience visuelle, autres handicaps, etc.
En effet, ces pathologies ou accidents provoquent souvent des troubles moteurs (apraxie, tremblements, dysphagie) et/ou mentaux (mémoire défaillante, difficultés de concentration, agitation) qui rendent difficile voire impossible une alimentation normale et autonome avec comme corollaire la perte d’estime de soi, le repli, des attitudes d’opposition, voire parfois le refus de s’alimenter.
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En simplifiant l’action de manger et en rendant facultatif le recours à des couverts, le manger-main apparaît comme une solution permettant de préserver l’autonomie du résident/patient, pour qui l’aide d’un tiers durant le repas ne sera plus nécessairement aussi soutenue. Cette autonomie retrouvée est bénéfique tant pour le senior, qui peut manger à son rythme et selon ses envies, que pour le personnel de l’EHPAD, qui pourra se rendre disponible pour d’autres tâches.
En outre, en offrant un contact direct avec la nourriture, le manger-main permet une réelle stimulation sensorielle qui suscite l’envie et le plaisir de manger. Le manger-main peut donc être un moyen efficace de limiter le risque de dénutrition des personnes âgées.
Enfin, le manger-main permet de réduire les troubles du comportement au moment du repas : levers répétitifs, déambulation, agitation, cris, opposition, etc. Les établissements ayant mis en place le manger-main remarquent généralement une nette amélioration des conditions de prise des repas, qui redeviennent des moments de plaisir, de partage et d’échanges.
Mettre en place un régime manger-main
Si la mise en place du manger-main au sein de la cantine d’un EHPAD n’est pas en soi une opération particulièrement complexe, elle nécessite toutefois une coordination entre tous les intervenants : direction, médecin, soignants, diététiciens, cuisiniers, résidents et familles.
Il s’agira dans un premier temps d’obtenir l’adhésion de tous en expliquant les avantages du manger-main et en déconstruisant les préjugés négatifs qui pourraient éventuellement être exprimés : pratique infantilisante, dévalorisante, contraire aux règles de bienséance, peu hygiénique, etc.
Le passage à un régime manger-main doit également être apprécié au cas par cas, selon l’état de santé et les besoins du résident, et être approuvé par l’équipe médicale.
Côté cuisine, le manger-main suppose également quelques adaptations. La préparation de repas manger-main n’engendre pas de surcoûts significatifs mais requiert néanmoins un temps de travail plus important pour les chefs. Il peut s’avérer également nécessaire de former les cuisiniers aux techniques du manger-main et d’investir dans un matériel adéquat : mixeur, robot-cuiseur, blender, centrifugeuse, moules de cuisson, etc.
Techniques de préparation des repas manger-main
Concrètement, la plupart des aliments peuvent être travaillés en manger-main, sous différentes formes et textures : liquides, semi-liquides, mixées, molles, hachées ou entier. Si la personne n’a pas de difficultés de déglutition ou mastication, il est préférable de conserver une texture normale. L’on présentera alors les aliments sous forme de quiches, flans, toasts, bâtonnets, frites, nuggets, etc. En cas de problèmes de dysphagie et pour limiter le risque de « fausse route » (inhalation involontaire de fragments d’aliments qui se retrouvent dans les poumons), il conviendra d’adapter la texture : mixée ou hachée.
Afin de pouvoir être facilement pris en main, la texture des « bouchées » doit être modifiée avec des agents de texture. Plusieurs solutions existent pour donner du liant aux aliments. Pour les bouchées qui sont consommées froides, la gélatine d’origine animale (porc, bœuf) ou l’agar-agar (algue rouge) sont conseillés. Pour les préparations chaudes, l’agar-agar fait également l’affaire tout comme les œufs, les flocons de pommes de terre, les fécules de maïs ou encore des poudres épaississantes de pharmacie.
Par ailleurs, il est possible d’enrichir une préparation manger-main pour en augmenter la valeur nutritionnelle. L’enrichissement peut être protéique (viande, poisson, œufs), lipidique (beurre, huile, crème fraîche), glucidique (pâtes, pain, miel) ou encore calcique (produits laitiers).
Enfin, la présentation des repas est tout aussi importante pour stimuler l’appétit. Ne pas hésiter donc à varier les formes, les volumes et les couleurs pour rendre les repas attrayants.
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